laptop-g2e950edff_1920

La prise d’acte de la rupture du contrat de travail est un mode de rupture particulier qui permet à un salarié qui reproche des manquements à son employeur de rompre son contrat de travail, dans l’objectif ensuite que le Conseil de prud’hommes requalifie la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

ll est nécessaire de connaître toutes les modalités de mise en place et les conséquences avant de se lancer.

       

Consultez notre dossier dédié à la prise d’acte de la rupture du contrat de travail

Démission, prise d’acte de la rupture ou résiliation judiciaire du contrat de travail ?

Définitions

Le principe de la prise d’acte de la rupture du contrat de travail est le suivant : le salarié qui reproche des manquements graves à son employeur peut l’informer qu’il prend acte de la rupture de son contrat de travail, puis saisir ensuite le Conseil de prud’hommes d’une demande de qualification de la prise d’acte en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. 

La prise d’acte est possible quelle que soit la nature du contrat (CDI ou CDD), mais elle n’est pas possible durant la période d’essai. 

Dans le cadre d’une prise d’acte, la rupture du contrat de travail est alors immédiate et définitive.

Ce mode de rupture se distingue donc : 

  • de la démission, qui permet à un salarié de quitter son emploi de sa propre initiative et sans justification, après le respect d’un préavis ;
  • de la résiliation judiciaire, qui suppose également que le salarié reproche des manquements à son employeur, mais qui n’entraîne pas immédiatement la rupture du contrat de travail (le contrat se poursuit si la procédure n’aboutit pas). 

Quels risques le salarié prend-il lorsqu’il prend acte de la rupture de son contrat de travail ?

Le salarié qui prend acte de la rupture de son contrat de travail prend le risque que sa rupture produise les effets d’une démission, avec toutes les conséquences que cela emporte. Il faut donc s’assurer que les manquements reprochés à l’employeur soient suffisament graves. 

Par ailleurs, lorsque le salarié prend acte de la rupture, son contrat de travail cesse immédiatement et il n’est donc plus rémunéré. De plus, le salarié ne peut pas bénéficier d’indemnités chômage immédiatement après sa prise d’acte : il doit attendre la décision du Conseil de prud’hommes pour savoir s’il pourra en bénéficier ou non (sous réserve qu’il remplisse les conditions).

Quand faire une prise d’acte ?

Manquements suffisament graves de l’employeur 

Le salarié peut prendre acte de la rupture de son contrat de travail lorsqu’il reproche à son employeur des manquements suffisamment graves qui empêchent la poursuite du contrat de travail.

Le juge appréciera souverainement au cas par cas le caractère justifié ou non de la prise d’acte, en fonction des éléments de preuve apportés par le salarié.

Exemples tirés de la jurisprudence

Pour avoir un aperçu des manquements pouvant justifier une prise d’acte, il faut se tourner vers la jurisprudence, notamment les décisions de la Cour de cassation :

  • Discrimination, harcèlement moral ou sexuel (1) ;
  • Non-paiement de tout ou partie du salaire, des heures supplémentaires (2) ;
  • Modification du contrat de travail sans l’accord du salarié (3) ;
  • Non-respect du droit au repos hebdomadaire (4) ;
  • Retrait injustifié du véhicule de fonction (l’employeur modifie alors unilatéralement le contrat de travail du salarié) (5) ;
  • Absence d’organisation des visites médicales obligatoires, sauf si cela résulte d’une simple négligence de l’employeur (6).

Notre dossier dédié à la prise d’acte

Comment se déroule une prise d’acte ?

Informer l’employeur par l’envoi d’un courrier 

Le salarié qui décide de prendre acte de la rupture de son contrat de travail doit obligatoirement en informer l’employeur.

Il n’y a pas de formalisme imposé. Il est cependant préférable d’adresser à l’employeur un courrier recommandé avec accusé de réception, qui liste les faits reprochés à l’employeur et qui justifient que ces faits font obstacles à la poursuite du contrat de travail. 

Saisir le Conseil de prud’hommes

Après avoir informé l’employeur, le salarié doit saisir le Conseil de prud’hommes, qui statuera sur les conséquences de la prise d’acte de la rupture du contrat de travail.

Le salarié dispose d’un délai de douze mois maximum à compter de la notification de la rupture. (7)

La saisine du Conseil de prud’hommes est gratuite.

Une fois saisi, le Conseil de prud’hommes dispose d’un délai d’un mois pour rendre sa décision. 

Il décide alors : 

  • soit que la prise d’acte est justifiée ;
  • soit que la prise d’acte est injustifiée. 

Prise d’acte justifiée ou injustifiée : quelles conséquences pour le salarié ? 

Indemnités 

Si la prise d’acte est justifiée, elle produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse (ou d’un licenciement nul dans certains cas). 

Le salarié bénéficie des indemnités suivantes : 

  • indemnité de licenciement ;
  • indemnités compensatrices de congés payés et de préavis ; 
  • indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (ou indemnité forfaitaire pour violation du statut protecteur, si le salarié est un salarié protégé). 

Si la prise d’acte n’est pas reconnue comme justifiée par le Conseil de prud’hommes, elle produit les effets d’une démission. 

Les conséquences sont alors les suivantes : 

  • le salarié verse à l’employeur qui le réclame une indemnité compensatrice de préavis, dont le montant correspond à la rémunération du salarié pour la durée du préavis non effectué ;
  • le salarié perçoit l’indemnité compensatrice de congés payés et toute autre somme éventuellement due à la rupture du contrat (prime, plan d’épargne salariale, etc.) ; 
  • le salarié peut être amené à rembourser à l’employeur des frais de formation si une clause de dédit-formation est prévue dans le contrat de travail.

Droit au chômage

Si la prise d’acte est justifiée, le salarié pourra prétendre au versement rétroactif de l’allocation d’aide au retour à l’emploi versée par Pôle emploi, s’il en remplit les conditions. 

Dans le cas contraire, la prise d’acte produisant les effets d’une démission, le salarié ne pourra pas percevoir d’allocation chômage. 

Tout savoir sur la prise d’acte en 11 points clés

Sources : 

(1) Cass. soc., 26 janvier 2005, n°02-47.296

(2) Cass. soc., 1er décembre 2004, n°02-46.231

(3) Cass. soc., 13 juillet 2005, n° 03-45.247

(4) Cass. soc., 7 octobre 2003, n°01-44.635

(5) Cass. soc., 16 décembre 2015, n° 14-19.794

(6) Cass. soc., 8 février 2017, n°15-14.874

(7) Article L. 1471-1 du Code du travail

 

Photo : Pixabay

À lire dans la catégorie Dossiers de Synthèse
16 avril 2024

Contrat de travail à temps partiel : quelle est la durée minimum ?

wrist-watch-gad937f483_1920
La loi pose des règles spécifiques concernant la durée minimum d’un contrat de travail à temps partiel. Il existe en effet une durée légale minimale, à laquelle il [...]

Lire la suite →

1 décembre 2023

Que choisir entre licenciement économique ou rupture conventionnelle ?

Licenciement économique ou rupture conventionnelle
Lorsqu’une entreprise fait face à des difficultés économiques, elle peut être amenée à négocier une rupture conventionnelle avec le ou les salarié(s) concerné(s) [...]

Lire la suite →

29 novembre 2023

Quelle est la procédure de licenciement à respecter en cas d’inaptitude ?

Quelle est la procédure à respecter en cas de licenciement pour inaptitude ?
Un employeur peut être amené à se séparer d’un salarié pour plusieurs raisons. Le présent article reprend les différentes étapes à respecter lorsqu’il sera question [...]

Lire la suite →

24 novembre 2023

Quelle est la procédure de licenciement pour motif économique ?

Licenciement pour motif économique : quelle procédure ?
Lorsque pour des raisons économiques (baisse de chiffre d’affaires), une cessation d’activité, ou encore, pour des mutations technologiques (introduction d’une [...]

Lire la suite →

7 novembre 2023

Comment se calculent les indemnités de licenciement pour inaptitude ?

Comment se calcule l'indemnité de licenciement pour inaptitude ?
Lorsque la procédure de licenciement pour inaptitude arrive à terme, le salarié doit bénéficier de différentes indemnités pouvant s’avérer complexes à calculer. [...]

Lire la suite →

À propos du blog des Éditions Legimedia

Les articles juridiques du blog des Éditions Legimedia sont rédigés en interne par des juristes spécialisés en droit social, après un travail de recherche approfondie, afin de vous apporter des informations claires, à jour des dernières dispositions légales et conformes.

Ce blog propose différentes catégories et thématiques liées à l’actualité du droit du travail et des conventions collectives (champs d’application, salaires, horaires de travail, congés, formation professionnelle, etc.), aux obligations de l’employeur en matière de sécurité et d’affichage, aux registres obligatoires ou encore à la mise en conformité d’une entreprise selon le code du travail.