Les conséquences de la modification du contrat de travail d’un salarié par la seule volonté de l’employeur ne justifie plus dans toutes les situations un motif de licenciement économique pour cause réelle et sérieuse. Cette solution récente rendue dans un arrêt du 11 juillet 2018, abouti donc à l’évolution des règles en matière de motif de licenciement.
Les règles concernant la modifications des éléments essentiels d’un contrat de travail
Par principe, les éléments essentiels du contrat de travail ne peuvent pas être modifiés sans l’accord du salarié.
Lorsque l’employeur envisage la modification d’un élément essentiel du contrat de travail pour un motif économique par exemple, depuis la loi quinquennale pour l’emploi du 20 décembre 1993, il doit en faire la proposition au salarié par lettre recommandée avec avis de réception.
Les motifs économiques que peut invoquer l’employeur sont (C. Trav., L1233-3) :
– des difficultés économiques caractérisées par l’évolution significative d’au moins un indicateur économique comme la perte d’exploitation par exemple
– des difficultés économiques liées à des mutations technologiques
– des difficultés économiques relatives à une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité
– des difficultés économiques liées à la cessation d’activité de l’entreprise
Si le salarié donne son accord, alors dans ce cas, le contrat de travail peut être modifié par un avenant au contrat dans un délai d’un mois maximum après la date d’effet de la modification, sachant que la modification ne peut se faire que sur les éléments sur lesquelles toutes les parties se sont accordées.
A noter que si l’employeur ne respecte pas le délai d’un mois accordé au salarié pour répondre, s’il décide de le licencier, le licenciement était considéré jusqu’à récemment comme abusif, peu importe le motif invoqué par l’employeur. Mais, si l’entreprise est en redressement ou en liquidation judiciaire, alors dans ce cas le délai passe d’un mois à 15 jours.
Néanmoins, même si le salarié donne son accord, le contrat de travail doit garder la même finalité.
Cependant, le salarié ne dispose que d’un mois pour faire connaître son acceptation ou son refus, par conséquent, à défaut de réponse, il est réputé avoir accepté la modification proposée par l’employeur (C. Trav., L1233-6).
Les conséquences du refus du salarié de voir son contrat de travail modifié
Si le salarié fait connaître son refus concernant la modification de son contrat de travail dans le délai imparti d’un mois, jusqu’à récemment l’employeur pouvait décider de le licencier mais il devait alors respecter les règles de procédure. Or, depuis un arrêt récent de juillet 2018, les règles sont différentes selon le motif de licenciement invoqué par l’employeur.
Dans tous les cas, tout refus du salarié doit être écrit (une lettre recommandée avec avis de réception est exigée). Un refus verbal ne suffit pas.
Lorsqu’au moins 10 salariés refusent la modification proposée et que leur licenciement est envisagé, l’employeur doit respecter les dispositions applicables en cas de licenciement collectif et donc établir un plan de sauvegarde si cela est nécessaire.
Par ailleurs, lorsque la modification a un caractère arbitraire ou vexatoire, tout salarié peut prétendre à des dommages-intérêts pour rupture abusive en cas de licenciement.
Néanmoins, depuis une affaire du 11 juillet 2018 (n°17-12747), un licenciement pour refus du salarié peut être valable mais uniquement si l’employeur a un véritable motif économique.
Ainsi des limites sont désormais posées par la jurisprudence.
Dans cette affaire du 11 juillet 2018 (n°17-12747), l’employeur voulait réorganiser le service financier de l’entreprise. Mais cette réorganisation ne résultait pas de difficultés économiques, de mutations technologiques et elle n’était pas indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise. Ainsi, le licenciement du salarié a été considéré comme étant sans cause réelle et sérieuse.
Cet arrêt rendu par la deuxième chambre civile de la cour de cassation a également permis d’en venir à la solution que le seul refus du salarié d’une modification de son contrat de travail ne constitue pas une cause réelle et sérieuse. Par conséquent, le licenciement pour cause réelle et sérieuse ne peut être jugé qu’en cas de motif personnel ou économique réel.
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Lire : Le remaniement du licenciement économique par l’ordonnance du 22 septembre 2017