Connu de tous, le secret professionnel peut s’avérer plus complexe selon les situations, et plus particulièrement lorsqu’il se mêle au droit du travail.

En principe, chaque professionnel intervenant au sein d’un système de santé a pour obligation de respecter le secret médical, qui correspond au secret professionnel.

Néanmoins, dans certaines circonstances, le secret professionnel pourra être levé ou partagé avec certaines personnes.

Le secret médical ne peut donc pas être considéré comme une immunité à toute procédure disciplinaire.

       

En quoi consiste le secret professionnel ?

Il est nécessaire de préciser avant toute chose que la notion de « secret médical » est un terme utilisé indifféremment du terme « secret professionnel », au regard de la loi.

Par application de l’article L. 1110-4 du Code de la santé publique : « Toute personne prise en charge par un professionnel de santé, un établissement ou service, un professionnel ou organisme concourant à la prévention ou aux soins, dont les conditions d’exercice sont régies par le présent code, le service de santé des armées, un professionnel du secteur médico-social ou social ou un établissement ou service social et médico-social (…) a droit au respect de sa vie privée et du secret des informations la concernant ».

Ce nouvel article, mis en œuvre par la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 dite de modernisation de notre système de santé, permet de prendre en compte l’extension du champ d’application du secret professionnel au secteur social et médico-social.

Cela concerne donc désormais les membres des professions médicales, le personnel soignant de manière générale ainsi que toute personne exerçant son métier dans un établissement de santé ou au sein d’un cabinet médical, peu important la fonction exercée.

Les personnes ayant une fonction administrative au sein de ces établissements ou cabinets sont aussi concernées par les présentes dispositions.

Il est nécessaire de préciser que par application de l’ article R. 4127-4 du code de la santé publique, le secret professionnel est mis en œuvre dans l’intérêt des patients et s’impose à tout médecin dans les conditions définies par la loi.

Par ailleurs, un professionnel peut échanger avec un ou plusieurs professionnels identifiés, des informations concernant une même personne prise en charge, sous réserve toutefois qu’ils participent tous à sa prise en charge et que ses informations soient strictement nécessaires à la coordination, la prévention, la continuité des soins ou encore le suivi médico-social et social.

A titre d’exemple, certains membres du personnel relevant de la branche de la convention collective Etablissements médico-sociaux peuvent tout à fait être concernés par ce secret professionnel.

CCN Établissements Médico-sociaux

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L’employeur peut-il demander des informations sur l’état de santé de son salarié ?

Non, un employeur ne peut pas contraindre un salarié à lui fournir des éléments sur son état de santé.

Pour rappel, l’article R. 4127.4 du code de la santé publique précise que « le secret couvre tout ce qui est venu à la connaissance du médecin dans l’exercice de sa profession, c’est-à-dire non seulement ce qui lui a été confié, mais aussi ce qu’il a vu, entendu ou compris ».

 

Un médecin peut-il communiquer à l’employeur des informations sur l’état de santé d’un salarié ?

Non, un médecin ne doit aucunement communiquer des informations médicales sur l’état de santé d’un salarié à son employeur.

Il est aussi nécessaire de préciser que le dossier médical du salarié est couvert par le secret médical.

Toutefois, différentes situations permettent à un professionnel de santé de divulguer des informations médicales au procureur de la République, notamment en cas d’infractions pénales, telles que :

– des violences conjugales, seulement si la vie de la victime se trouve en danger immédiat et qu’elle n’a pas la possibilité de se protéger (divulgation des informations au procureur de la République) ;

– des sévices ou privations permettant de penser des violences physiques, sexuelles ou psychiques ont été commises (l’accord de la victime sera toutefois ici nécessaire pour divulguer les informations au procureur de la République, excepté si la victime est un mineur ou est incapable de se protéger).

 

Un salarié peut-il être licencié sur la base d’informations de son suivi médical patient ?

C’est tout le cœur de la récente décision rendue par la chambre sociale de la Cour de cassation en date du 15 juin 2022 n° 20-21.090.

Dans cette affaire, il était question de savoir si un salarié ayant été sanctionné disciplinairement pouvait ou non utiliser le motif du secret médical auprès des patients dont il est en charge, pour ne pas mettre en cause sa responsabilité disciplinaire.

Dans cette affaire, la salariée estimait que son licenciement était fondé sur une violation par l’employeur du principe fondamental du secret médical, et que ce licenciement était de ce fait nécessairement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La salariée estimait de ce fait que son licenciement reposait en totalité sur une faute de l’employeur, dans la mesure où celui-ci s’était référé aux dossiers médicaux de plusieurs résidents.

En effet, la salariée estimait que dans la mesure où l’employeur avait été amené à consulter plusieurs dossiers médicaux de nombreux résidents, « dont la précision de la première lettre du nom ne garantissait pas un parfait anonymat », il y avait eu violation des règles relatives au secret médical.

Ce n’est pas la solution retenue par les juges qui ont ainsi estimé qu’un salarié professionnel de santé, participant à la transmission de données couvertes par le secret, n’a pas la possibilité de se prévaloir, envers son employeur, d’une violation du secret médical pour contester le licenciement fondé sur des manquements à ses obligations ayant des conséquences notamment sur la santé des patients.

En principe, un licenciement fondé sur une violation par l’employeur du principe fondamental du secret médical rend ledit licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Ainsi, les juges ont rappelé dans cette décision le principe même du secret médical qui est instauré dans l’intérêt premier des patients.

Il s’agit-là d’un droit propre au patient mis en œuvre dans le but de protéger la vie privée ainsi que le secret des informations concernant ce patient.

De ce fait, un professionnel de santé peut tout à fait être sanctionné et son licenciement sera justifié par les manquements à ses obligations ayant des conséquences sur la santé de ses patients, dans la mesure où celui-ci participent à la transmission des données couvertes par le secret.

Ce salarié ne pouvait donc se prévaloir à l’égard de son employeur d’une violation constituée du secret médical.

 

Un expert mandaté par le CHSCT peut-il être dépositaire du secret médical ?

Si l’on se base sur une affaire rendue par la chambre sociale de la Cour de cassation en date du 20 avril 2017 n° 15-27.927, les juges ont rappelé le principe selon lequel toute personne prise en charge par un établissement de santé a droit au respect de sa vie privée et au secret des informations qui la concerne.

Par ailleurs, ce secret professionnel permet de couvrir toute les informations arrivées à la connaissance d’un ou plusieurs membres du personnel dédits établissements, ainsi que de toute autre personne en relation, en lien avec ses activités, avec ces établissements.

De ce fait, un expert mandaté par le CHSCT dont la mission consiste à examiner l’accroissement de la charge de travail ainsi que l’inadaptation des locaux, ne peut être considéré comme une personne en relation avec l’établissement, ni comme intervenant dans le système de santé pour les besoins de la prise en charge des patients.

De ce fait, le directeur d’un centre hospitalier peut tout à fait interdire à un expert mandaté par le CHSCT l’accès au blocs opératoires durant les interventions ainsi que durant les réunions quotidiennes des équipes médicales.

A titre informatif, les missions du CHSCT (Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail) sont désormais exercées par le CSE (Comité Social et Economique) depuis le 1er janvier 2020.

 

À lire : Le recours au licenciement en cas de faute professionnelle

À lire : Mise en place du CSE : effectifs et obligations de l’employeur

À propos de l'auteur
Laurie Gomari

Laurie Gomari - Juriste au sein des Éditions Legimedia.

Diplômée d'un Master I en droit social et d'un Master II en GRH Audit social, je suis juriste d'entreprise en droit social au sein des Editions Legimedia. Mes compétences actuelles me permettent de relever différents défis et de répondre aux attentes des clients en matière de règlementation sociale. [...]

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